Relu par Dr Erick Petit, radiologue expert en endométriose, fondateur et responsable du centre de l’endométriose du GHPSJ, président de RESENDO
1/10, c’est LE chiffre relatif à l’endométriose le plus répandu : une femme sur dix serait touchée par la maladie. À l’échelle mondiale, selon les données de la Banque mondiale de 2017, pas moins de 190 millions de femmes dans le monde seraient donc atteintes d’endométriose ! Mais attention, répandu ne signifie pas avéré. La proportion pourrait être largement supérieure avec une femme touchée sur cinq, ce qui ne nous étonne pas.
Mais alors, comment savoir où se situe la vérité ? Bonne question. Ce qui est sûr, c’est que le fameux 10% communément accepté doit être pris avec des pincettes. En effet, ce dernier émane de descriptions de population générale basées sur des sources médico-administratives. Autrement dit, ne sont comptabilisés que les cas traités à l’hôpital, très souvent opérés par coelioscopie. On se trouve donc face à une très nette sous-estimation.
Si l’on observe le phénomène autrement, au regard de la prévalence de l’endométriose (en gros, combien de personnes sont touchées) dans une population qui consulte pour infertilité par exemple, le chiffre peut atteindre 50%. Parmi l’échantillon des femmes qui vivent des douleurs pelviennes sévères, la proportion est également élevée (jusqu’à 20% des femmes ayant des douleurs pelviennes ont une endométriose). En bref, d’un échantillon de référence à l’autre, les chiffres varient significativement.
Chez les adolescentes, ces chiffres sont encore plus impressionnants. Jusqu’à 49% des adolescentes se plaignant de douleurs pelviennes chroniques ont une endométriose, et 75% de celles pour qui les traitements médicamenteux ne font aucun effet sur les douleurs souffrent d’endométriose.
En réalité, si l’on prend en compte le fait que certains cas d’endométriose sont asymptomatiques, que les délais de diagnostic sont longs, et qu’il faut une certaine expertise pour diagnostiquer la maladie par imagerie, on peut imaginer que les femmes atteintes d’endométriose représentent bien plus que ces 10%.
Mais d’ailleurs, d’où viennent ces chiffres ? Pour beaucoup, de la science qu’on appelle l’épidémiologie. Elle étudie la répartition des maladies et des problèmes de santé dans une population et permet de décrire la prévalence (le nombre de cas). Elle sert également à mettre en relation divers facteurs avec les risques qu’ils représentent de développer une pathologie et apporte ainsi les connaissances nécessaires à la prévention.
Dans le cas de l’endométriose, les études scientifiques sont malheureusement peu nombreuses. Erick Petit, radiologue spécialiste, déplore d’ailleurs ce manque cruel d’études de grande envergure qui nous permettraient de mieux comprendre la maladie. Malgré ça, des tas de signes indirects font penser que la prévalence a réellement augmenté.
Ça veut dire quoi ? Qu’il y a BEAUCOUP plus de cas qu’on ne veut bien l’admettre aujourd’hui. Parce que l’endométriose, les règles, la santé féminine sont tabous mais aussi peu et mal considérées, parce qu’on ne consulte pas, parce qu’on pense que c’est normal d’avoir mal… Et aussi parce qu'on ne s'est pas assez penché sur cette maladie qu’on connaît pourtant depuis si longtemps.
Face à ce constat, on fait quoi ? On en parle ! C’est le choix qu’on a fait chez Lyv : parler de l’endométriose, apprendre à mieux la connaître, à la comprendre pour mieux l’apprivoiser. C’est aussi le meilleur conseil qu’on ait à donner : parlez, de vos symptômes, de vos douleurs, dans les cabinets de médecins spécialisés, chez le psy, à vos ami.e.s, proches, famille, partenaires, collègues. Parler pour être mieux diagnostiquée, comprise, accompagnée. Parler pour sensibiliser et pour aider.
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