"Je suis convaincue qu'il faut arrêter d'avoir peur de faire du sport quand on a mal"
Avant d'interviewer la coach en vogue et journaliste bien-être, forme et lifestyle Julie Pujols, il y a quelques semaines, je pensais que endométriose et sport étaient comme deux antonymes. Pour moi, si j'avais mes règles, mal au ventre, dans le bas du dos, aux cuisses, ou tout en même temps, ça n'était même pas la peine de tenter de faire un peu d'exercice. Je pensais que ça n'allait pas atténuer mes douleurs, et pire, les empirer. Que quand j'avais des douleurs liées à mon endométriose, il fallait plutôt m'abstenir pour me lover en boule, dans mon canapé. Sauf que voilà, j'ai fini par interviewer Julie pour Lyv. Et un peu pour moi aussi, je ne vais pas vous mentir.
Vous l'avez compris, Julie fait du Pilates, beaucoup de Pilates. Elle adore entraîner des femmes avec elle, depuis une dizaine d'années, via Les Cours de Julie, après avoir obtenu son diplôme d'état en fitness et musculation. Nous avons d'ailleurs eu la chance de tester ses cours pendant un mois, et l'expérience a été concluante, avec une mention spéciale pour la variété des exercices et leur enchaînement en musique ! Sans cesse en quête de renouveau, elle a créé le Pilates Booty et le Color Sculpt et notamment écrit le livre "En harmonie avec son corps grâce à Julie Pujols". Même si à l'heure où j'écris ces lignes, je suis allongée avec une bouillotte au lieu d'être à mon cours de yoga, on peut dire que Julie a un peu fait vaciller certaines de mes croyances. Avec Julie Pujols, nous avons parlé de son amour pour le Pilates, de sa propre définition de cette pratique, et déconstruit les clichés qui nous empêchent automatiquement de faire du sport quand on est malade… et qu'on a de l'endométriose, par exemple.
Avant 2009, j'étais journaliste à 100% , et je ne faisais pas beaucoup de sport, à part de la danse. Je dois même dire que j’étais vraiment nulle... (rires). Et puis, cette année-là, je me suis renversée une bouilloire sur le ventre… S’en est suivi un mois de convalescence : j’avais tout le côté gauche du corps brûlé et j’ai dû porter une combinaison de grande brûlée pendant un an et demi. C’est une fois bloquée dans mon lit d’hôpital que j’ai compris l’importance du mouvement. Ça a été un vrai déclic, suite auquel j’ai obtenu le BPAGFF mention cours collectifs et musculation en 2011, un diplôme d'Etat qui m'a permise de devenir coache sportive. Je me suis éclatée, et surtout en pratiquant le Pilates. C’est son créateur, Joseph Pilates, qui m'a beaucoup inspirée : il a travaillé avec beaucoup de danseur·euse·s dans son studio à New York et la pratique du Pilates leur a beaucoup plu, par rapport à celle du fitness par exemple, qui abîme le plancher pelvien, entre autres. Pour moi, le Pilates était la nouvelle discipline salvatrice.
Le Pilates, c'est tout simplement une discipline qui permet de muscler et de tonifier l’ensemble du corps, et plus particulièrement le centre du corps, à savoir les abdominaux profonds et le plancher pelvien, dont le périnée (l'ensemble des tissus qui forment le plancher du petit bassin entre l'anus et les parties génitales, ndlr.). La particularité de cette pratique est sa lenteur d’exécution. Au Pilates, on est dans la conscience du mouvement, on privilégie la qualité à la quantité. Cela permet de se reconnecter à son centre, aussi bien physiquement que psychologiquement. Puisque c'est une pratique assez douce, je la complète souvent avec du renforcement musculaire.
À ce jour, il y a encore trop peu d'études qui prouvent les bienfaits du Pilates sur l’endométriose. Mais ce qu’on sait, c’est que le mouvement, tout comme la respiration, soulagent la douleur. Aussi, généralement, les ostéopathes, kinésiologues et médecins de la douleur soutiennent que le mouvement peut aussi faire bouger les adhérences entre les organes présentes chez les femmes qui ont de l'endométriose. En conséquence, ces adhérences peuvent s'assouplir, les organes moins se crisper et les douleurs s'atténuer. De plus, le fait de stimuler la circulation sanguine a un côté anti-inflammatoire.
Et puis, lorsqu’on est "bloquée" sexuellement parce qu'on a mal lors des rapports sexuels, ce qui correspond à un autre symptôme fréquent de la maladie, apprendre à prendre conscience, à engager, à travailler son périnée peut stimuler la libido. Enfin, exercer son périnée permet aussi de protéger du prolapsus génitaux (la descente dans le vagin des différents organes qui reposent sur le plancher pelvien : l'utérus, la vessie ou le rectum principalement, ndlr.), et d'avoir un ventre plus plat, et pourquoi pas d'agir sur le fameux endobelly.
Autant vous dire qu'en tant que professeure de Pilates, je me base sur les retours de mes élèves pour affirmer haut et fort que oui, le Pilates ne peut que leur faire du bien. Le centre de leur corps est souvent une zone avec laquelle elles sont en « guerre », alors c’est important de bien la travailler pour mieux la connaître et apprendre à la maîtriser. En fait, se reconnecter à soi via le mouvement a des effets positifs sur plusieurs pans de la vie des femmes, même si - et surtout si - elles sont touchées par une maladie comme l’endométriose.
C’est vrai que souvent, des filles me disent « je ne fais pas de sport aujourd’hui, j’ai mes règles. » Pourtant, le mouvement, peut être LA clé anti-douleur, tandis que la sédentarité peut au contraire amplifier la douleur… Moi, quand j’ai mes règles et que j’ai mal, je continue à donner des cours, et ça me soulage complètement. Mais encore une fois, tout dépend du niveau de douleur, et de comment on se sent dans son propre corps. L'idée, c'est plutôt de vous inviter à faire le test, si le corps vous en dit, et de voir si cela vous aide… ou non.
Oui, c'est vrai et pourtant, ce n'est pas parce qu'on contracte ses abdominaux qu'on va accroître ses douleurs ! Bien au contraire, la contraction apporte un afflux sanguin au corps qui s'oxygène davantage. Alors oui, quand on (re)commence à solliciter ses abdos, on peut avoir des courbatures, mais c'est assez rare (par rapport aux courbatures aux fesses, par exemple). C'est pour ça que je prône plutôt la régularité et la connaissance de son corps, pour apprendre à différencier les douleurs liées à la pratique du sport et celles liées à une crise d'endométriose. Selon moi, deux séances par semaine suffisent ! En tout cas, je suis convaincue qu'il faut arrêter d'avoir peur de faire du sport quand on a mal.
On pense souvent que le sport épuise davantage, mais au contraire, ça réénergise. Personnellement, depuis que je fais autant de sport, je ne suis jamais fatiguée ! Et pourtant, en ce moment, mon fils me réveille deux fois par nuit, et je peux vous dire que ça n'a aucun impact sur mon entraînement. Selon moi, le sport, c'est vraiment le meilleur remède contre la fatigue et même la déprime… Mais encore une fois, certaines vont être confrontées à plus de fatigue que d'autres, sport ou non. À expérimenter, donc !
Bien sûr. Grâce au Pilates, on peut ressentir toutes sortes de sensations et d'émotions. Cette pratique peut aider les femmes qui souffrent d'endométriose à avoir une meilleure image de leur corps, à le voir tel un allié, et non tel un ennemi uniquement associé à la douleur… En fin de séance, je prévois toujours quelques minutes de relaxation, et je demande à mes élèves ce qu'elles ressentent aussi bien dans leur corps et dans leur tête. Et en général, elles se sont défoulées, se sentent redynamisées, plus confiantes et fières d'elles. La force physique apporte la force mentale, en ce sens, endométriose et sport peuvent tout à fait aller de paire ! C'est un vrai cercle vertueux.
Il faut juste y aller, sans trop réfléchir ! Au bout de deux semaines, avec l'habitude, ton corps devrait te le redemander. Installe ton tapis… et c'est parti !
Merci Julie, on a hâte d'imaginer la suite avec toi !
Note de la rédaction de Lyv : suite à cette interview, nous voulions juste rappeler de ne pas culpabiliser si vous sentez que votre corps vous appelle plutôt à vous reposer : si le sport peut aider à soulager les douleurs de l'endométriose, ici, l'injonction n'a pas sa place. Comme toujours, mieux vaut rester à l'écoute de son corps, faire quelques mouvements quand on le sent, quitte à sauter un ou deux petits cours de sport pour accorder à son corps le repos dont il a besoin. Si vous avez l’énergie et que les douleurs sont gérables, foncez ! Si l’énergie n’est pas au rendez-vous, ou les douleurs trop fortes, on remettra nos baskets demain, et c’est ok. Le tout, c’est de réussir à maintenir une activité de manière régulière et que le sport vous apporte un véritable mieux-être.
Endogirl, journaliste et consultante éditoriale indépendante, je m'intéresse surtout à la santé des femmes, à la parité, à la culture, à la société et au travail… qui participent à la construction d'un monde meilleur !
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