Dyspareunie. Ce mot un peu étrange désigne l’un des premiers symptômes de l’endométriose : les douleurs avant, pendant et après les rapports sexuels. Quand on est atteinte d’endométriose, faire l’amour peut être extrêmement difficile : les ovaires, le vagin, la vessie, le rectum et les ligaments utéro-sacrés sont en effet les organes les plus souvent touchés par les lésions. Entre la libido en berne et les positions qui font mal, avoir une vie sexuelle épanouie peut donc s’avérer compliqué… Mais pas impossible. S’il n’existe pas de formule magique pour se débarrasser du problème (malheureusement !), voici quelques pistes pour vous aider à retrouver une sexualité plus sereine.
Petit préambule
Avant de rentrer dans le vif du sujet, nous souhaitions faire un point qui nous paraît très important : avoir une sexualité active n’est pas une obligation. Entre les demandes des partenaires et les injonctions de la société à s’adonner au sexe tout le temps, difficile de ne pas se sentir sous pression... Avoir des rapports sexuels doit être un choix fait avec enthousiasme, et non une corvée. Si vous avez mal ou que vous n’êtes pas d’humeur, vous n’avez pas à vous forcer. Si votre partenaire insiste, ce n’est pas acceptable.
Vous l’avez peut-être remarqué, les douleurs peuvent survenir à l’excitation, pendant et après un rapport sexuel même s’il n’y a pas eu de pénétration : sous l’effet des stimulations, l’utérus se contracte ce qui peut provoquer de la douleur.
La localisation de cette douleur varie chez toutes les femmes. Certaines n’ont mal qu’à un seul endroit, d’autres à plusieurs. Certaines n’ont pas de douleurs particulières durant les rapports. Cela dépend des endroits où sont situées les lésions. On distingue principalement deux types de dyspareunie :
La baisse de libido n’est pas en soi un symptôme de l’endométriose… mais les conséquences de la maladie sont telles que la libido en pâtit bien souvent, de manière indirecte. Comment l’endométriose affecte-t-elle la libido ? Essentiellement de deux façons :
Les émotions jouent un rôle fondamental dans le désir. Alors, quand la peur prend le dessus… difficile de se sentir excitée. Si pendant que vous faites l’amour vous ressentez des douleurs intenses (avec les sentiments de culpabilité et de honte qui vont parfois avec…), il est probable qu’envisager un nouveau rapport sexuel soit source de stress et d’appréhension. Ce qui est tout à fait normal ! Le sexe est censé être synonyme de plaisir, non de souffrance. Cette appréhension crée des tensions musculaires au niveau du vagin et diminue la lubrification et… vous l’avez ? Les douleurs et l’inconfort pendant le rapport augmentent. De quoi casser un peu le moral et toute envie de recommencer.
La pilule contraceptive est le principal traitement de l’endométriose. Elle permet, dans certains cas, de stopper la progression des lésions et d’atténuer les douleurs. Prise de façon continue, elle peut modifier le désir pour certaines femmes. Cette modification de la libido n'est pas aujourd'hui complètement expliquée par la recherche scientifique, mais la baisse de la testostérone libre, de la progestérone ou de l'ocytocine pourrait y contribuer.
Néanmoins, chez certaines chanceuses, l’inverse se produit : le désir augmente ! En bref, si vous êtes plutôt dans le premier cas, sachez que la baisse de libido peut avoir une origine hormonale.
Enfin, on peut aussi évoquer les effets secondaires des traitements hormonaux. Ces effets sont propres à chacune, mais la pilule peut déclencher une prise de poids, des problèmes de peau, des pertes de cheveux, ou assécher le vagin. Si l’impact de ce dernier point dans votre vie sexuelle peut sembler évident, il ne faut pas sous-estimer le poids psychologique des autres effets indésirables. Quand on voit son corps changer soudainement, quand on ne se sent pas à son avantage, et bien on a rarement envie d’aller faire la lap-dance du siècle à sa moitié ! (Et on le répète : c’est normal).
D’un autre côté, sachez que la pilule peut aussi avoir un effet positif sur votre sexualité. Chez certaines, elle permet de limiter les douleurs au cours du cycle ou d’atténuer le SPM. Elle peut aussi améliorer l’aspect de la peau, et comme nous l’avons vu plus haut, accroître le désir, ou au contraire ne rien changer. On ne peut donc que vous encourager à tester différentes approches, et à être à l’écoute de votre corps !
Bon, on ne va pas se mentir, l’état des lieux est un peu déprimant. Quand on se dit que l’endométriose vient même pourrir notre vie sexuelle, ça fout un petit peu (BEAUCOUP) la mort. Mais mais mais… On a pas dit notre dernier mot ! Il existe plein de manières de rebooster sa libido et de réveiller la tigresse qui sommeille en vous ! Puisque la libido relève aussi bien du domaine physique que du domaine psychologique, il faut prendre en compte les deux pour essayer de l’améliorer. Voici quelques idées :
Les douleurs ont tendance à varier selon les moments du cycle. Pour certaines femmes, les douleurs se calment deux semaines après les règles, pour d’autres c’est après l’ovulation. Suivez vos symptômes tout au long du mois, pour comprendre comment votre corps fonctionne et repérer les éventuels schémas. Cela vous permettra certainement d’identifier les périodes les plus favorables pour un week-end love love, ou la bonne soirée pour se réserver une chambre d’hôtel romantique !
Si vous êtes suffisamment à l’aise avec ces pratiques, la masturbation et l’auto-gynécologie peuvent vous permettre de réapprivoiser votre corps : vous apprendrez à identifier avec plus de précision les zones de douleurs et de plaisir. C’est aussi l’occasion d’apprendre à connaître les gestes qui vous font du bien et ceux qui sont à proscrire. Cela vous permettra de donner des repères à votre partenaire… Et d’en avoir pour vos bons moments en solo !
L’auto-gynécologie est un concept qui vous échappe ? Il s’agit d’une pratique initiée par des féministes dans les années 70, dont le but est de se réapproprier son corps et les savoirs médicaux. Des ateliers existent pour échanger autour de nos connaissances anatomiques et apprendre l’auto-observation. Faute d’ateliers près de chez vous, nous vous conseillons aussi d’excellents ouvrages pour apprendre à mieux se connaître : Jouissance Club : une cartographie du plaisir par Jüne Plä aux éditions Marabout, ou encore, Connais-toi toi même ; guide d’auto-exploration du sexe féminin par Clarence Edgard-Rosa, aux éditions de la Musardine.
Gynécologue, sexologue, sage femme, kénisithérapeute, spécialiste de l’endométriose… Un.e thérapeute pourra vous aider à trouver des solutions. N’hésitez pas à impliquer votre partenaire dans les démarches, afin de rassurer et de faire comprendre les mécanismes de la maladie à quelqu’un qui n’a pas forcément les clés pour comprendre. Si vous n’êtes pas à l’aise d’initier cet échange avec votre partenaire, vous pouvez déjà consulter un.e professionnel.le en solo, et répandre la bonne parole auprès de votre partenaire.
La sexothérapie cognitive et comportementale est très efficace pour gérer l’aspect psychologique et travailler sur l’anxiété liée à la peur de souffrir. La physiothérapie pelvienne, elle, peut vous aider sur l’aspect physique des douleurs en apprenant à relâcher les muscles du périnée. Il ne s’agit là que d’exemples, les pratiques pouvant vous aider sont nombreuses. N’hésitez pas à demander conseil au spécialiste qui vous suit ou auprès des associations, pour avoir des contacts de confiance.
Ce conseil est bon à prendre pour bien vivre sa sexualité en général et est particulièrement indispensable quand on souffre d’endométriose. Votre partenaire ne vit pas dans votre corps et n’a aucune idée de ce que vous traversez. Dialoguez avec lui, dites-lui ce qui vous fait mal, les positions qui vous sont douloureuses et celles qui vous apportent du plaisir, parlez de vos sensations. Votre partenaire n’est pas à votre place mais vous pouvez l’aider à imaginer comment c’est pour vous.
Votre traitement peut affecter la lubrification vaginale et provoquer des sécheresses. Si c’est le cas, gardez du lubrifiant sous la main pour compenser ! Votre gynécologue peut vous conseiller des dispositifs pharmaceutiques. Pour les adeptes du naturel, l’huile d’amande douce fait très bien l’affaire et est sans danger pour la muqueuse vaginale.
Dans une relation hétéro, la pénétration est bien trop souvent au centre de la sexualité. Le terme bien connu de “préliminaire” désigne toutes les pratiques avant la pénétration, comme si elles n’étaient qu’une mise en bouche (sans mauvais jeu de mot) avant le plat principal. Cette conception des rapports sexuels est, one ne va pas se mentir, assez centrée autour du plaisir masculin.
En effet, la pénétration n’est qu’un moyen de stimuler la partie interne du clitoris et, pour la grande majorité des femmes, n’est pas le chemin le plus simple vers la jouissance. Caresses, baisers, zones érogènes, masturbation mutuelle, sexe oral font autant partie de l’acte sexuel que la pénétration.
Par ailleurs, il existe de nombreuses positions différentes sans pénétration, notamment pour les couples lesbiens. Si vos douleurs ne sont pas au niveau de la vulve, vous pouvez vous essayer aux Ciseaux (classique mais efficace), au Tête à Tête, à la Liane, ou au Double Devoir...
Si vous aimez la pénétration et avez envie de la pratiquer, certaines positions vous conviendront mieux que d’autres, en fonction de comment les douleurs se manifestent dans votre corps. Chaque personne est unique, il n’existe donc pas une liste de positions qui fonctionnent pour tout le monde. A vous de tester (en douceur) et de voir ce qui vous convient.
Votre partenaire peut rapidement se retrouver démuni et ne pas savoir quoi faire pour vous faire plaisir et éviter de vous faire mal : quelle vitesse, quelle profondeur ? Guider, expliquer peut s’avérer laborieux. Essayez des positions ou vous avez le contrôle, telles que l’Andromaque, l’Amazone, ou encore, la Danseuse du ventre et la Chaise magique si votre partenaire est une femme : cela vous permettra de maîtriser la cadence des mouvements.
Bien souvent, positions profondes et endométriose ne font pas bon ménage. Si c’est votre cas, vous serez peut-être plus à votre aise avec l’écrin à bijoux (face à face) ou la cuillère. Dans ces positions vous pouvez contrôler la profondeur de la pénétration et avoir accès à votre clitoris par la même occasion.
Si une position que vous aimez bien vous fait mal, vous pouvez toujours essayer de l’adapter. La levrette, par exemple, favorise une pénétration profonde et peut donc créer des douleurs insupportables dans certains cas. Pourquoi ne pas essayer une levrette allongée ? Plus confortable, très intime grâce au contact des corps entiers, elle vous épargnera peut-être le frottement de points douloureux.
Rien de tel que le culte de la performance et la course à l’orgasme pour se mettre la pression et oublier de vivre le moment présent. Le slow sex a pour vocation de répondre à ce problème en invitant à vivre la sexualité en pleine conscience, en lâchant les attentes et les idées préconçues sur ce que l’expérience devrait être. On se concentre sur le contact, le toucher, la chaleur des corps, les odeurs… bref, on se reconnecte avec les sensations immédiates.
Nous l’avons vu, faire l’amour quand on a de l’endométriose peut s’avérer compliqué. Mais les douleurs et la baisse de libido ne sont pas des fatalités. Apprendre à connaître son corps, communiquer avec ses partenaires et sortir des sentiers battus, sont des moyens de mettre de côté les injonctions et de se reconnecter à son plaisir. Oui, c’est parfois un long chemin, mais ne baissez pas les bras : petit à petit, vous arriverez à être en paix avec votre corps, pour une vie sexuelle épanouie.